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iô8 VOYAGE DANS LA MARMARIQUE ET LA CYRÉNAÎQUE. à-fait changé autour de moi. A la longue contrainte du cheik, avaient succédé des torrents de larmes ; au silence et à l’immobilité de l’assemblée, avaient succédé les imprécations de la fureur et l’impétuosité de ses mouvements. E t , malgré le grand tumulte qui régnait, malgré les éclats tonnants des rauques vociférations, les cris de désespoir de la mère retentissaient dans tout le camp; sa voix couvrait.toutes les voix , comme si les angoisses d’une mère avaient une force surnaturelle, comme si sa douleur devait surpasser toutes les douleurs. Cette scène, déchirante par son objet, terrible par son expression, et accompagnée de l’obscurité de la nuit et des accès violents de l’orage, produisait un effet profond. La nature paraissait se prêter au désordre des passions humaines : le mugissement des vents dans la forêt se confondait avec la rumeur confuse du camp; et de longs éclairs, en pénétrant dans la tente, répandaient leur éelat livide sur l’aspect hideux du tableau. Cependant peu à peu l’orage se calma, et ce calme de la nature ne fit qu’accroître la fureur dés hommes. Plus de vague courroux, plus de cris tumultueux; mais les mots sang et vengeance étaient répétés de toutes parts. De toutes parts on sellait les juments, on entendait le cliquetis des armes. Les femmes seules exhalaient encore des plaintes : elles parcouraient ensemble le camp; leurs cheveux dénoués flottaient sur leurs visages; elles portaient leurs jeunes enfants, les pressaient contre leur sein, les montraient aux spectateurs ; et, poussant de longs gémissements que répétaient les échos des montagnes, elles provoquaient ainsi tous les guerriers au combat. . Déjà un grand nombre d’Arabes étaient partis; le cheik était à leur tête; moi-même j ’avais quitté sa tente, objet de deuil et d’horreur. Un groupe d’arbres voisin m’avait offert un gîte ; et là , quoique long-temps troublé par la rumeur expirante des voix, quoique mon esprit fût vivement frappé de tant d ’objets affreux, je parvins enfin à goûter quelques moments de repos. P A R T I E OUI E M A U ! D E L A PENTAPOLE LIIÎYOÜE S !5--------- S a ie s je 600 a» D egré


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